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L’amour de Dieu, c’est un amour...

homélie du 32°dimanche A, 9 novembre 2008

Un peu étrange, ce récit. Faisons un peu d’histoire pour mieux le comprendre... Selon l’usage juif, le festin a lieu dans la maison de l’époux. L’époux va chercher l’épouse en cortège, avec des lampes, de la musique et des chants, pour la ramener chez lui dans la salle de noces. Les amies de noce, ou peut-être même les jeunes filles du village entourent l'épouse et sortent au devant de l'époux à son arrivée. Elles prennent part aux cérémonies du mariage, aussi bien qu'au banquet qui a lieu chez l'époux, sans invitation particulière, à condition d’être revêtues d’habits de fête et d’avoir avec elles leurs lampes.

Le Royaume de Dieu est donc un peu comme ce repas de noces où tout le monde est le bienvenu. Il suffit, en fait, de s’être préparé.

Il peut y avoir des préparatifs fébriles ou inquiets. On peut être soucieux du qu’en dira-t-on... On peut aussi être inquiet parce qu’on se demande : est-ce que j’ai récolté suffisamment d’huile ? Si je me compare aux autres invités, je me demande si j’ai accumulé assez de belles actions pour ne pas manquer d’huile quand le Seigneur viendra, sans compter toute l’huile que j’ai renversé par mes péchés...Mais est-ce une bonne façon de réfléchir ? Je crois que cela contredirait beaucoup de récits de l’évangile, le parcours de tous ces chéris de la miséricorde que sont par exemple la femme adultère et le bon larron.

Toutes les jeunes filles sont invitées, tous les hommes sont conviés au Royaume de Dieu. Mais toutes les jeunes filles ne se tiennent pas prêtes. Et pour celles qui ne sont pas prêtes, on dirait que quand l’époux arrive, il est trop tard pour se préparer ; elles se retrouvent dehors quand la porte est fermée et que les jeunes filles qui étaient prêtes sont entrées avec l’époux dans la salle des noces.

Cela nous paraît dur. Il semble y avoir un rude contraste avec une vision de Dieu qui nous accueille toujours, qui nous aime quels que soit notre attitude. Pourtant, n’est-ce pas cela l’amour de Dieu : un accueil inconditionnel, la tolérance de tout ? Quand nous parlons comme ça, j’ai l’impression que nous comparons l’amour de Dieu à une couche de peinture que Dieu viendrait mettre sur nos laideurs. Et si nous disons qu’il nous accueille tels que nous sommes, est-ce que nous ne nous attendons pas un peu à ce que le paradis soit comme un de ces cocktails gratuits où on peut venir faire le pique assiette et repartir comme on est venu ?

Or, l’amour c’est l’amour. L’amour de Dieu est simplement un amour, avec toutes les dimensions de l’amour, notamment l’attente d’un partage. Comme tout amour, l’amour de Dieu est quelque chose qui s’échange, qui se donne et se reçoit. Un amour partagé, c’est un immense bonheur. Un amour refusé, c’est une peine sans fond. Imaginez que quelqu’un vous aime beaucoup, et que vous lui répondez simplement : « c’est bon à savoir... Je prends note pour le jour où j’aurai besoin de toi. » Vous lui faites une belle offense, et vous piétinez son cœur. Bien sûr il pourra encore vous le pardonner, s’il vous aime tant, mais vous, quand vous aurez vraiment réalisé ce que vous avez fait, vous serez vraiment mal.

C’est ce genre de chose que Jésus nous annonce dans l’évangile. L’histoire de la porte qui se ferme un moment donné, c’est pour nous dire, non pas que le cœur de Dieu se fermera, mais qu’un jour la possibilité pour nous de montrer à Dieu notre amour se fermera. Savoir qu’on va passer sa vie avec quelqu’un qui nous aime tant sans avoir encore la possibilité de lui montrer notre amour, ça doit être super dur ; je ne voudrais pas vivre cela.

Alors, tâchons d’avoir nos lampes pleines d’huile ! Nous ne devons pas être en mesure de dire à Dieu : regarde tout le bien que j’ai accumulé par ma vie bonne ! Il ne s’agit pas d’avoir une liste de bonnes actions à présenter à Dieu, mais de venir à lui avec un cœur ouvert et plein de désir de Dieu. Ce désir de Dieu existe même dans le cœur de ceux qui ne le connaissent pas, qui l’ignorent non par indifférence mais parce que personne ne leur en a jamais bien parlé. Nous devons pouvoir dire à Dieu quand nous le verrons face à face : dès que j’ai connu le bien, j’ai essayé de le faire de tout mon cœur. Ainsi mon cœur te désire tellement, toi le vrai bien. Et maintenant que je te vois tel que tu es, je sens que mon cœur brûle d’amour pour toi. C’est cela, veiller pour le retour de l’Époux.

Tous, il nous faut apprendre à aimer le bien, le vrai, et non pas seulement notre petit bien. Heureux les artisans de paix et de justice !