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croire pour comprendre et comprendre pour croire

homélie du 4°dimanche de l’Avent, 21 décembre 2008

Comme j’aime cette attitude de Marie qui, lorsque l’ange lui annonce qu’elle sera mère, répond « Comment cela va-t-il se faire, puisque je suis vierge ? » Puis déclare : « Voici la servante du Seigneur ; que tout se passe pour moi selon ta parole », lorsque l’ange lui a expliqué que la puissance du Seigneur viendrait sur elle. Pour bien percevoir ce qui se passe ici, nous pouvons comparer avec la réponse de Zacharie à l’ange qui lui annonçait la conception de Jean-Baptiste : « Comment vais-je savoir que cela arrivera ? Moi, je suis un vieil homme, et ma femme aussi est âgée. » Zacharie ne demande pas, comme Marie, une explication. Il demande une preuve. Il en deviendra muet.

Zacharie comme Marie utilisent leur raison en face des affirmations de l’ange. Mais pas de la même manière. Zacharie estime que ce qui n’est pas vérifiable par la raison n’est pas admissible par elle non plus. Si la raison n’a pas les preuves qu’elle demande, elle ne peut pas s’ouvrir à ce que Dieu affirme. Tandis que Marie ne demande pas quelque chose de démontrable rationnellement. Elle demande qu’il n’y ait pas de contradiction et que ce que l’ange lui annonce soit sensé. A première vue, ce que l’ange lui annonce n’a pas de sens : elle ne peut pas concevoir un fils en étant vierge. Mais lorsque l’ange lui annonce que c’est la puissance du Très-Haut qui fera cela elle-même, et que rien n’est impossible à Dieu, Marie estime que tout cela a du sens.

Cette attitude de Marie par rapport au miracle de la conception virginale de Jésus est un bel exemple de la rencontre de la raison et de la foi. Saint Augustin a résumé dans une de ces formules dont il avait le secret la position qu’on pourrait dire être la position de Marie : « oui, il faut comprendre pour croire et croire pour comprendre » (Sermons, 43, 9)

Nous pourrions penser que l’exigence d’une foi éclairée nous ferait dire : “je ne veux pas croire tant que je n’ai pas compris”. Mais alors, nous resterions toujours comme en dehors de la démarche de foi, en spectateur qui ne descend pas sur scène mais observe à distance.

Il arrive que nous nous demandions : est-ce que je crois ? Est-ce que je crois assez pour me dire chrétien ? Si j’ai du mal d’admettre certaines choses de la foi, puis-je penser que je suis croyant ? Quand cette question nous assiège, nous risquerions de nous dire : c’est trop difficile de croire ; je me contente de bien agir... Pourtant, bien souvent, nous avons commencé à croire alors que nous n’y pensions même pas. « Au tréfonds de la condition humaine repose l’attente d’une présence, le silencieux désir d’une communion. Ne l’oublions jamais, ce simple désir de Dieu est déjà le commencement de la foi. » (Fr. Roger)

Nous pouvons être soulagés de savoir qu’il n’y a pas des étapes claires dans notre démarche intérieure. Il ne faut pas tout comprendre pour croire, de même qu’il ne faut pas tout croire avec la même intensité pour sentir qu’on adhère à Dieu, à son amour, à son plan de lumière pour les hommes. Notre désir de comprendre, plutôt que nous paralyser, pourrait nous conduire plus loin. Nous dirons : “je voudrais comprendre ce que je crois un peu, pour y croire encore mieux”.

Marie, dans son intelligence, fait entrer des données de la foi : elle sait que Dieu peut faire des merveilles, qu’il est raisonnable de compter sur Dieu. Et si Dieu dit lui-même qu’il fera naître un fils dans ses entrailles, elle peut l’admettre, puisque Dieu est Dieu. Marie n’est pas prête à croire n’importe quoi. Mais à croire en Dieu, en ce qu’il dit, en sa Parole.

De même aujourd’hui, nous ne sommes pas prêts à croire tout ce qu’on nous dirait, mais nous découvrons que Jésus a pris du pain et a dit : ceci est mon corps... (Mc 14,22) Cela ne nous laisse pas indifférents. De même, il a dit : tous ceux à qui vous remettrez leurs péchés, ils leur seront remis (Jn 20,23). Nous voulons croire cela pour commencer à le comprendre, et le comprendre un peu pour le croire plus clairement.

On peut trouver cette phrase dans « Pressens-tu un bonheur ? » ou sur le site de Taizé