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Une paix pour notre cœur

Homélie du Festival de la lumière 2009

Jésus,
lumière de nos cœurs,
depuis ta résurrection, toujours tu viens à nous.
Où que nous en soyons,
toujours tu nous attends.
Et tu nous dis : Venez à moi,
vous qui peinez sous le fardeau
et vous trouverez l’apaisement.
Bénis-nous,
et fais-nous choisir des chemins de lumière,
toi qui règne pour les siècles des siècles.

Commençons notre méditation en regardant la figure de Syméon. Il accueille l’enfant Jésus à l’entrée du temple en s’écriant : « maintenant mes yeux ont vu le salut que tu prépares pour tous les peuples ». En faisant cela, il se révèle à nous comme l’homme de l’espérance et il nous interpelle aujourd’hui au sujet de l’espérance. Cet homme a été capable de voir ce que Dieu faisait alors que c’était encore si confidentiel, si imperceptible, et il a pu s’en réjouir profondément. Voir ce que Dieu fait même lorsque c’est peu visible, être témoin de cet amour de Dieu agissant dans le monde et s’en réjouir, laisser son cœur chanter un chant de reconnaissance, c’est une des belles choses que nous pouvons apporter au monde.

Nous sommes à une époque où Dieu semble de plus en plus écarté de l’espace public, de tout ce qui fait les relations des hommes, de tout ce qui éclaire leurs attitudes aussi. Nous pourrions nous dire : je verrai le Royaume de Dieu le jour où les hommes d’argent et de pouvoir se mettront à vivre selon l’Évangile, le jour où les conflits ne seront plus réglés par la force mais par le dialogue, le jour où telle situation pénible dans ma vie changera... Mais si nous adoptons cette attitude, le bonheur reculera sans cesse devant nous, comme l’arc-en-ciel au pied duquel il y a un trésor. Jamais dans l’histoire de l’humanité on n’a vu le Royaume de Dieu réalisé parce que tous les hommes se sont mis à vivre selon l’Évangile. Même à une époque où presque tout le monde était baptisé en Occident, dans les siècles passés, beaucoup d’hommes pratiquaient la religion sans aimer. Ni en ce temps-là ni aujourd’hui nous ne pouvons nous dire que le monde où nous vivons est idéal. Et nous ne le pourrons jamais.

Pourtant, notre cœur ne doit pas être morose, il peut être dans la lumière, même au milieu des peines de notre monde et de notre vie. Non pas que nous allons fuir vers quelque paradis tropical ou artificiel, mais l’espérance de Syméon nous est accessible. Nous pouvons commencer à voir la lumière de Dieu autour de nous. L’Esprit Saint peut nous donner cette sensibilité à ce que fait le Christ et faire grandir en nous la joie de la proximité de Dieu. Le gros problème du péché, mis à part le mal qu’il fait aux autres, c’est qu’il nous rend insensible à cette lumière du Christ et à sa joie. Mais nous pouvons demander l’Esprit Saint, et le laisser commencer d’ouvrir nos cœurs. Au milieu de nos doutes, la lumière vient nous consoler et nous donner d’espérer.

Dans l’Évangile de ce jour, nous voyons les gens de Nazareth accueillir Jésus avec une froideur du cœur. Ils disent : mais nous le connaissons bien, nous savons bien qu’il est un homme ordinaire, seulement plus sage que les autres sans doute... Le sujet est clos ! Et nous voyons que Jésus ne peut pas faire grand-chose chez eux. Nous découvrons dans l’attitude des gens de Nazareth un moyen de paralyser Dieu, d’éteindre la lumière : c’est la froideur du cœur, qui fait accueillir les meilleures choses avec scepticisme. Le scepticisme n’est pas le doute, il est plutôt le refus d’espérer. Ce n’est pas une hésitation parce que nous ne voyons pas tout dans une grande lumière et que nous ne comprenons pas tout, c’est plutôt une grande maladie du regard. Au lieu de voir déjà la lumière, nous ne voyons que ce qui est sombre, ou pire encore : nous sommes capables de dire que ce qui est lumière n’est en fait rien de fiable, rien de vraiment réel.

Je repense à cette phrase de Etty Hillesum, une jeune juive d’origine athée qui ouvre peu à peu son cœur à Dieu au début de la seconde guerre mondiale. Elle disait : «  Je vais t’aider mon Dieu à ne pas t’éteindre en moi ; c’est à mon tour de t’aider et de défendre jusqu’au bout la demeure qui t’abrite en nous... ». Oui, le Dieu du ciel et de la terre s’arrête à la porte des cœurs, il frappe et il attend que nous ouvrions. Il dépend de nous que nous nous repliions en nous-mêmes ou que nous lancions une passerelle vers l’extérieur pour voir ce qui va commencer à se passer.

Et qu’entre nous aussi nous puissions nous montrer les uns aux autres la lumière de l’espérance, susciter un simple désir de Dieu, « redonner de la vigueur aux genoux qui fléchissent » disait la première lecture. Quant à Dieu, il s’occupe d’être vraiment la lumière !