homélie de la messe des étudiants, 30 novembre 2015

Quand{joomplu:488} nous ne comprenons pas tout de l’Évangile, il y a déjà assez pour nous avec ce que nous pouvons comprendre. Devant un tel texte (Lc 9,57-62), je me rappelle cette prière de frère Aloys de Taizé, où il disait à peu près : Seigneur, nous comprenons si peu de ta Parole, mais ton Esprit nous donne de repartir avec ce qu’il nous faut de nourriture.

Une chose est sûre : il est question de comment être disciple. Il y a plusieurs façons d’être disciple, et ce n’est pas la même chose d’être religieuse, prêtre, personne mariée ou jeune étudiant. Mais depuis son baptême chacun est appelé à être disciple, à prendre Jésus pour maître et à le suivre, selon son style de vie.

D’emblée nous apprenons que Jésus n’est pas un gourou racoleur. Il ne fait pas venir à lui en bradant les exigences. Quand cet homme lui dit : je te suivrai partout, Jésus le met en garde : il sera comme lui, sans endroit où reposer la tête. Voilà le style de vie ! Cela me fait penser à l’épisode que nous entendrons demain, où Jésus envoie 72 disciples sans bourse ni sac ni sandales. Ou quand il dit : pourquoi vous inquiéter pour la nourriture et le vêtement ? Et de quel droit peut-il nous faire vivre ainsi ? Parce qu’il y a le Père ! Il dit au même endroit : votre Père sait que vous en avez besoin ! Oui, suivre le Christ nécessite de compter sur le Père comme lui, de vivre avec le Père comme lui. Nous le pouvons, car Jésus l’a rendu possible pour nous, il a fait de nous des filles et des fils adoptifs.

Dans la suite du texte, nous nous trouvons devant l’attitude qui consiste à dire : je te suivrai, mais… Et la radicalité des exemples pris (mais je dois enterrer mon père, mais je dois faire mes adieux à ma famille) nous indique quelque chose de radical : dire « oui, mais » ça ne peut jamais marcher, en aucune circonstance. Jésus ne nous invite pas à manquer de respect envers un père (sinon, il parlerait contre les commandements), mais il nous pousse à résister au « oui, mais ».

Quelles seraient les situations de notre vie ou nous voudrions dire nous aussi « oui, mais » ? Il se peut que nous sentions l’appel intérieur à prier davantage, et nous répondons oui mais nous sous-entendons que si nous ne sentons rien ou que nous ne nous voyons pas devenir meilleur, nous pourrions bien abandonner la prière. Et alors nous ne persévérons pas, nous ne traversons pas l’obstacle du doute ou de l’aridité, et nous restons tout triste.

Ou bien nous entendons l’appel à partager ce qui nous reste, et nous disons oui mais nous ajoutons que nous allons garder quand-même une part pour telle chose qui nous fait envie. Nous partageons à moitié, pas de tout cœur, et nous sommes insatisfaits.

Enfin, il y a le moment où le Christ nous dit : donne-moi ta vie ! Donne-la moi dans la vie consacrée, ou comme prêtre, ou en te donnant à un époux, à une épouse. Et nous répondons oui, mais si je te donnais plutôt une année, une année rien que pour toi ? Et nous ne nous donnons pas jusqu’au bout. Alors il nous manque la plénitude, le Royaume ne se déploie pas en nous. Car nous sommes faits pour nous donner tout entiers. Pas de demi-mesure, pas de « oui, mais » si on veut vivre à la mesure dont Dieu nous a faits.

Finalement, ces petits événements racontés dans l’Évangile nous disent aussi que la réponse n’attend pas. Lorsque l’appel est là, il ne faut pas traîner, fatiguer l’Esprit Saint et le noyer dans le flot rapide de notre vie. « N’éteignez pas l’Esprit », disait saint Paul (1Th 5,19).

Seigneur, donne-nous de nous mettre à ta suite résolument, libérés des « oui, mais » qui alourdissent notre marche et menacent notre joie. Fais nous entrer dans la joie du « oui » tout entier !