Pour nous également, les façons d’agir de Dieu dans notre vie nous déroutent si souvent. Parfois même nous nous demandons si nous faisons bien de compter sur Dieu, étant donné telle prière non exaucée, tel événement fâcheux survenu. Alors comme Jean-Baptiste nous nous demandons : es-tu le Dieu qui me sauve, ou dois-je chercher autre chose ? D’autant plus que Dieu ne se gêne pas avec nous. Il est d’une audace incroyable quand il se permet de ne pas répondre à nos attentes, à ce que légitimement et même selon les données de la foi nous estimons devoir recevoir de lui. Comme disait un jour sainte Thérèse d’Avila : Seigneur, si tu traites ainsi tes amis, ne t’étonne pas d’en avoir si peu ! Comment marcher avec un Dieu qui semble si lointain. D’autant plus que devant notre péché aussi nous pourrions nous décourager : toujours les mêmes péchés, dont des efforts loyaux ne permettent pas toujours de sortir !

Parfois les non-croyants disent que nous croyons en Dieu car c’est pour nous une béquille spirituelle, quelque chose qui apaise nos peurs et règle nos questions. Mais nous, les croyants, nous savons bien que notre chemin de foi est hérissé de questions, qu’il y a finalement plus de questions parce que nous croyons que si nous laissions là la foi pour nous dire : l’homme est apparu sur terre par hasard, il est simplement un animal plus astucieux que les autres, et à sa mort il disparaît comme tout le reste.

Notre foi est donc traversée par les doutes comme la foi de Jean. Y a-t-il vraiment un sauveur qui est venu à nous ? Quelle sera la réponse de Jésus ? Oui, il est le Sauveur : « annoncez à Jean ce que vous entendez et voyez : les aveugles voient, les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, les sourds entendent, les morts ressuscitent, et la Bonne Nouvelle est annoncée aux pauvres. » Il n’est pas le Sauveur tel que Jean-Baptiste le prévoyait, mais il est le Sauveur et ce qu’il fait est encore plus grand que de mettre au pas celui qui résiste à la conversion. Jean-Baptiste mourra en prison. Jésus, le Sauveur, mourra sur la croix. Notre fondateur n’a pas conquis de territoires au fil de l’épée, mais il a conquis les territoires des cœurs qui s’ouvrent à lui loyalement. Sa résurrection par le Père dépasse ce qui était attendu et se présente à nos cœurs comme le grand signe d’espérance. Dans nos attentes, nous pouvons nous réaffirmer à nous-mêmes : oui, tu es le Sauveur, et je pressens que ce que tu fais est encore plus grand que ce que j’avais prévu.

Comment vivre en se basant sur la foi ? Il nous faut nous mettre à la suite du Christ, il n’y a pas d’autre chemin. Retourner encore à ce que saint Paul nous disait la semaine passée : relire l’Écriture en y adhérant, en épousant l’espérance qu’elle nous dessine (Rm 15,4-5). Nous ne comprenons pas, mais « à qui irions-nous, Seigneur ? Tu as les paroles de la vie » (Jn 6).

Alors nous relisons par exemple Isaïe : « affermissez les genoux qui fléchissent, dites aux gens qui s’affolent : “Prenez courage, ne craignez pas. Voici votre Dieu : Il vient lui-même et va vous sauver.” un bonheur sans fin illuminera vos visage ; allégresse et joie vous rejoindront, douleur et plainte s’enfuiront. » (Is 35,3.4.10) Nous relisons saint Jacques qui nous dit que nous devons parfois la vivre dans la patience et la persévérance : « Ayez de la patience vous aussi, et soyez fermes... Prenez pour modèles d’endurance et de patience les prophètes qui ont parlé au nom du Seigneur. » (Jc 5,8.10)

Nous lisons tout cela et nous donnons à Dieu toute la place dans nos cœurs. Ainsi le salut entrera dans nos vies. Nos cœurs connaîtront une lumière que nous n’avons jamais pu nous donner par nous-mêmes. Nous vivrons dans l’amour du Seigneur et nous serons sauvés.