Cette décision de foi permet à notre cœur de se tenir au-dessus de tout ce qui l’agite bien souvent, tout ce qui nous fait nous demander si nous sommes aimables et aimés, tout ce qui nous fait crier : et moi, et moi ! Il y a en nous un besoin vital de reconnaissance, qui cherche à être rencontré, mais qui si souvent pourrit nos relations. Nous attendons beaucoup de reconnaissance de notre conjoint, et qu’il comble nos besoins. Et si nous n’avons pas de partenaire, la culture d’aujourd’hui nous pousse à en avoir un au plus vite pour combler ce vide. Nous attendons de la reconnaissance de nos amis. Et aussi de nos collègues, de nos supérieurs, de l’Église, etc. Vivre à ce niveau est la source d’une grande tristesse, car d’une part nous devenons manipulateurs, essayant de tirer des autres la satisfaction et la reconnaissance nécessaires. Et d’autre part, c’est toujours une grande déception d’attendre d’un mortel la plénitude que Dieu seul peut donner.

Or, dans notre culture malade de superficialité et de revendications, il y a un besoin immense de créer un monde d’amour où on vit dans la chasteté, c’est-à-dire libérés du besoin fusionnel d’être reconnus. Tout amour devrait être chaste. Je ne parle pas de « chaste » au sens où les prêtres et les religieux doivent vivre leur célibat, mais de cette manière d’aimer où l’autre n’est pas là pour rencontrer mes besoins et les combler plus ou moins, mais où je l’aime pour lui, parce que c’est lui, parce qu’il est un enfant de Dieu libre et sauvé. C’est la juste et bonne manière d’aimer, et pourtant c’est très difficile d’aimer ainsi, car nous avons ce besoin de reconnaissance. Les tristesses et les agacements qui nous traversent nous indiquent bien souvent que notre cœur est centré sur nous-mêmes, que notre amour est possessif ou revendicatif.

Mais voilà : aujourd’hui nous réapprenons que le Sauveur est né, qu’il est venu exprès pour nous, que nous ne sommes plus seuls. Nous découvrons à quel point elle est pour nous cette parole des anges aux bergers : « aujourd’hui vous est né un sauveur ! » Enfin, notre cœur peut trouver la force d’aimer sans retour, car il est nourri par un amour qui vient d’au-delà de lui. En approchant notre cœur de ce mystère, nous le branchons sur la vraie source de son contentement. Vivre de foi transforme la vie en profondeur. Le centre, petit à petit, ce n’est plus moi, mais c’est Lui, par qui tout a été fait, par qui tout est visité et relevé. Nous voilà fortifiés intérieurement, et nous devenons même un refuge pour les autres.

En ces jours, trouvons des façons de dire du fond de notre cœur : Jésus, tu m’aimes et j’ai confiance en toi ; à mon tour je m’applique à t’aimer, à te saisir, à t’accueillir. Alors, au lieu de chercher coûte que coûte ma petite part de bonheur en ce monde, en ne supportant aucune contradiction, je pourrai accueillir les vérités qui me dérangent, me laisser construire par cet amour qui me sauve et enfin me donner moi-même, rayonner de cet amour qui en guérira beaucoup autour de moi. Alors, dans ma famille, au milieu de mes amis, au cœur de l’Église agitée de divers courants qui s’excluent les uns les autres, la paix de Noël deviendra réelle. Ô Christ, renouvelle-nous par ta venue !