homélie de la messe pour les défunts, 2 novembre 2018

Cette semaine{joomplu:86} j’ai eu l’occasion de discuter de la mort avec une personne, qui me disait : mais on ne sait rien de ce qu’il y aura après, qui peut le dire ? Cela m’a fait penser à cette petite parabole moderne que vous connaissez peut-être, racontée par le grand-rabbin de France1 :

Deux jumeaux sont dans le ventre de leur mère. Ils discutent philosophie.

— Tu crois qu’il y a une vie après la naissance ?

— Évidemment. Il doit forcément exister quelque chose au-dehors, car il me semble que nous sommes ici précisément pour nous préparer à ce plus tard.

— Mais non ! Ce n’est pas possible, et c’est même inepte. Il n’y a pas de vie après la naissance. Si c’était le cas, quelqu’un nous en aurait parlé. Donc, cela n’existe pas. Mais imaginons, comment serait ce monde futur ?

- Je ne sais pas, mais il y aurait certainement plus de lumière. Peut-être pourrions-nous même courir ? Manger avec nos mains et notre bouche ?

- Mais non, c’est une aberration ! On ne peut pas courir ! Et qui a vu une personne manger en utilisant sa bouche ! C’est le cordon ombilical qui nourrit l’homme, c’est prouvé scientifiquement.

- Écoute, je ne sais pas, mais ce que j’imagine, c’est que nous verrons nos parents et ils prendront soin de nous. Maman nous donnera le sein…

- Maman ? ? ? Tu crois en Maman ? C’est juste un concept abstrait sans fondement objectif, scientifique. Qui est Maman pour toi ?

- C’est grâce à elle que nous vivons. Nous tirons notre vie d’elle, nous n’existerions pas sans elle.

- Je ne crois pas ! Je n’ai jamais vu Maman, donc, elle n’existe pas.

- Comment peux-tu dire cela ? Lorsque nous sommes en silence et que nous ne nous bagarrons pas, nous pouvons entendre comme une sorte de chant qu’elle fredonne et nous percevons la manière dont elle ressent le monde extérieur. Lorsque tu es triste, tu aimes bien te coller à l’ombre de ce que nous avons appelé sa main, faute d’autre définition. Tu aimes lorsque tu as l’impression que cette main te caresse… Tu sais, je pense que la vraie vie commence plus tard…

Cette petite histoire qui évoque la foi en la vie après la naissance peut nous faire sentir pourquoi c’est également par la foi, et elle seule, que nous pouvons toucher un peu la vie après la mort. Bien sûr, il y a une très forte pression sociale pour ne croire que ce qu’on a pu expérimenter par soi-même. Mais c’est impossible que la vie après la mort soit expérimentable par nous-mêmes tout en restant ici. Que nous reste-t-il alors ? Il y a l’enseignement du Christ, relayé par les apôtres au péril de leur vie. Ils ont donné leur vie pour témoigner de ce qu’ils avaient vu : la mort n’a plus le dernier mot, Jésus en a fait un passage vers la vie éternelle, et il nous promet cette vie éternelle à nous aussi. Cette affirmation est arrivée jusqu’à nous à travers les générations ; elle est entre nos mains, entre les mains de notre cœur.

Cette affirmation est plausible, car elle parle de la vie éternelle comme d’une vie d’amour, et nous pressentons bien que nous sommes faits pour aimer, que l’amour est ce qui illumine le plus notre vie. Voyez sur vous-mêmes l’effet d’un sourire, d’un geste d’attention, de bonté ! Cette affirmation est plausible aussi car elle parle d’une purification qui doit parfois se vivre. Le cœur de nos chers défunts a parfois choisi de se fermer à l’amour, de se durcir, d’être indifférent. C’est pourquoi nous prions pour eux, pour qu’ils ressentent notre amour et soient soulagés dans leurs efforts d’accueillir les coutumes du Royaume de Dieu. À un moment donné, ils sont prêts, ils peuvent accueillir sans hésitation la miséricorde du Père et entrer dans la vie des bienheureux. Gloire à Dieu de nous offrir ce chemin !

1Haïm Korsia, Les enfants d’Abraham, Presses de la Renaissance, 2011.