homélie pour la commémoration des fidèles défunts 2025

Nous prions pour les défunts. Depuis le temps des premiers chrétiens l’Église prie pour les défunts (Cf. par exemple vers 200, Tertullien, De Corona, IV). Hier nous fêtions les saints, connus ou inconnus, peut-être même qui ont vécu dans notre rue. Comment sont-ils saints ? Parce qu’ils ont laissé Dieu les rendre saints. Leur foi a transformé leur vie. Ils ont mis le Seigneur au-dessus de toutes leurs priorités, et l’évangile a changé leurs décisions spontanées, a fait d’eux des hommes et des femmes nouveaux. Quand ils voient Dieu à leur mort, tout leur être s’élance vers lui, ils n’ont plus d’attaches pour ce qui n’est pas Dieu, ils sont prêts pour le Paradis.

Est-ce que nos chers défunts sont parmi les saints dans le Paradis ? Dieu seul le sait. Par le baptême nous savons qu’ils sont inscrits au Livre de vie dont a parlé l’Apocalypse (Ap 20,12) — et Dieu a d’autres possibilités de nous inscrire, comme, il me semble, la prière et le désir des parents des enfants morts sans baptême. Tous nos chers défunts, nous pouvons penser qu’ils sont inscrits au Livre de vie, leur destination finale est le Ciel et non l’enfer. Mais sont-ils prêts pour le Ciel ? N’ont-ils pas encore des attaches pour ce qui n’est pas Dieu ? Leur cœur ne doit-il pas être purifié ? Et puis, même s’ils se sont confessés sur la Terre de leurs péchés graves, n’ont-ils pas encore à réparer le mal qu’ils ont pu commettre ? Car bien sûr, celui qui a volé, celui qui a battu sa femme, celui qui a méprisé son frère, sa sœur, celui qui s’est laissé aller à la boisson ou à la drogue, celui qui a trompé, même s’il a demandé pardon en mourant, est-ce que ceux qu’il a blessés ou méprisés ou délaissés n’ont pas besoin que le mal subi soit reconnu ? Oui, il faut que Dieu reconnaisse le mal subi, et son pardon ne peut pas être un coup d’éponge. Le pardon de Dieu est acquis à celui qui regrette ses péchés, mais il reste une purification à accepter, et aussi le fait d’éprouver la tristesse d’avoir offensé Dieu et ceux qu’il nous avait confié. Nous l’avons entendu dans l’Évangile : « ceux qui ont fait le bien sortiront pour ressusciter et vivre, ceux qui ont fait le mal, pour ressusciter et être jugés. » (Jn 5,29) Le jugement n’est pas une condamnation, mais un dépouillement. Dieu dit : aucun mal n’entrera dans mon Paradis.

C’est pourquoi il se peut que nos défunts soient plutôt dans ce qu’on appelle le Purgatoire, avant le Paradis. Nous espérons qu’ils ne sont pas en enfer, qu’ils n’ont pas rejeté Dieu en le voyant. Mais nous ne sommes pas sûrs que leur cœur était prêt pour cette vie avec Dieu dans la justice et l’amour. Alors, prier pour eux est un bel acte d’amour. Nous ne prions pas pour amadouer Dieu et lui faire changer d’avis au sujet des défunts. Nous ne prions pas pour que Dieu soit plus miséricordieux qu’il ne l’est. Cela n’a pas de sens. Dieu est bonté, miséricorde, et il est justice à la fois. En Dieu justice et miséricorde ne sont pas comme en concurrence, mais travaillent ensemble à la sanctification du pécheur. Toutes les deux concourent à notre bien. Alors nous prions pour accompagner la transformation intérieure du défunt, une transformation coûteuse, car il doit se laisser transformer, et accepter le « temps » que cela prendra, la progressivité du changement en profondeur, tout en ayant entrevu l’immensité du bonheur du ciel. Nous prions pour qu’il ne se décourage pas en constatant le mal qu’il a pu faire autour de lui, les personnes qu’il a blessées, les dégâts qu’il a causés. Nous prions pour qu’il s’ouvre au cœur de Dieu au plus vite et que le renoncement à tout ce qui était égoïste, orgueilleux ou futile dans sa vie soit facilité.

Au terme de ce processus, il y a la lumière, la joie, la paix du Ciel. Il y a l’émerveillement continuel devant tout ce que nous découvrons de Dieu, de sa bonté, de sa beauté. Ce sera comme un voyage où on vit des expériences de plus en plus délicieuses, dans le bonheur d’aimer et d’être aimé. Le Ciel, c’est la chose la plus désirable de notre existence, celle à cause de quoi il est bon de faire des choix parfois difficile mais bons car ils sont porteurs de vie et d’espérance. Seigneur, apprend-nous à nous bouger pour le Ciel !