homélie du 5e dimanche C, 3 avril 2022

{joomplu:557} Par le prophète Isaïe, Dieu dit à son peuple quelque chose comme « j’apporte quelque chose de nouveau et de grand ». En regardant ce qui se passe quand on amène à Jésus la femme surprise en flagrant délit d’adultère on comprend. La voilà devant Jésus, le seul juste. A-t-elle déjà entendu parler de lui ? Peut-être, mais elle n’a pas dû l’écouter. Ni écouter les Écritures. Et Dieu sait dans quelle aventure elle s’est engagée ou a été entraînée. Le Seigneur lui-même ne cherche pas à savoir. Mais il lui apporte quelque chose de complètement nouveau. Cette nouveauté, ce n’est pas de dire que l’adultère ce n’est pas grave. Cette nouveauté, ce n’est pas de minimiser le péché. Cette nouveauté, c’est de lever la condamnation qui pesait sur la vie et le cœur de cette dame. « Personne ne t’a condamnée ? — Personne, Seigneur. — Moi non plus, je ne te condamne pas. Va ! Et désormais ne pèche plus. » Jésus ne se contente pas de dire : « je ne te condamne pas ». Il permet à cette femme de retrouver sa place dans un peuple qui a cessé de la condamner.

Nous pourrions nous dire que nous vivons maintenant dans un monde meilleur, car il n’y a plus de condamnation sociale de l’adultère ou d’autres péchés. En réalité, si nous ne condamnons plus, ce n’est pas parce que nous sommes devenus meilleurs, ce n’est pas parce que notre cœur s’est agrandi, mais parce qu’on estime que cela n’en vaut plus la peine. Le mariage ne vaut plus la peine d’être défendu. La religion ne vaut plus la peine d’être défendue. La vérité elle-même n’est plus une valeur en soi. Notre société ne condamne plus beaucoup d’actes contraires au bien, non pas parce qu’elle est devenue meilleure, mais parce que pour elle il n’y a plus qu’une seule valeur : la vie en tant que support de la liberté de faire ce que l’on veut. Ce faisant, elle condamne ses membres à quelque chose de tout aussi terrible : nous sommes tous condamnés à l’indifférence et à la solitude. Heureux celui qui parvient à tirer son épingle du jeu en s’entourant d’amis et d’argent. Malheur à tous les autres qui ne sont pas conformes au standard de force qu’impose une société de la liberté.

Je préfère clore cette parenthèse pour revenir à la libération apportée par le Christ, qui n’est pas la liberté de faire ce qu’on veut. Qu’est-ce qui est si merveilleux pour cette femme ? Ce n’est pas qu’elle va pouvoir continuer sa petite vie tranquille comme elle l’entend. Ce qui est merveilleux c’est qu’elle a trouvé le cœur de son Dieu. Dans ce qu’elle vit, nous pouvons comprendre en quoi consiste cette nouveauté annoncée par Isaïe 500 ans avant Jésus. Nous sommes libérés du péché. Qu’est-ce que cela veut dire ? Pas que Dieu passe l’éponge et que nous pouvons continuer à vivre selon nos projets et nos goûts, pour aboutir “on ne sait trop où mais on espère que c’est bien quand même”. Nous sommes libérés du péché, cela signifie que désormais nous savons toute la valeur immense de notre vie. Regardons notre vie ! Ce qui fait sa valeur, au fond, ce n’est pas ce que nous avons réussi et qui serait plus grand que ce que nous avons raté. Car même si la balance penchait du mauvais côté cela n’a pas d’importance. Ce qui fait la valeur de notre vie c’est que nous sommes tant aimés du Créateur de l’univers. Et pas aimés en général, mais chacun personnellement. Nous le voyons dans l’attitude de Jésus envers la femme adultère. Il l’aime tant ! Il lui redonne toute sa valeur aux yeux de ceux qui la dévaluaient. Et entendons-nous bien, ce n’est pas par une simple parole qu’il lui redonne cette valeur. C’est en prenant sur lui la condamnation qui pesait sur elle. Car cet épisode, avec quelques autres du même genre, c’est ce qui va le conduire à la condamnation à mort et à la croix.

Alors nous, avançons dans la vie en nous revêtant de l’amour du Christ déposé personnellement sur nous — ce que nous pouvons bien sentir dans le sacrement de la réconciliation et dans l’eucharistie. Qu’importe ce qu’on pense de nous ! Qu’importe ce que nous pensons de nous-mêmes ! Ouvrons grand notre cœur au cœur de Dieu, prenons du temps dans le silence pour goûter le vol de son amour qui se pose dans notre cœur. Il a donné sa vie. Cessons de l’ignorer !