homélie du 31e dimanche B, 4 novembre 2018

On entend{joomplu:98} souvent la foi chrétienne résumée ainsi : aimez-vous les uns les autres. Les chrétiens passent pour les spécialistes de l’amour. Pourtant, je n’en connais pas beaucoup qui soient à l’aise avec le premier commandement : aimer Dieu, de tout son cœur, de toute son âme, de tout son esprit, de toute sa force. Comment aimer Dieu ? C’est important car Dieu nous aime, alors comment lui répondre ? Cette semaine j’ai rencontré une dame qui disait : qu’est-ce que croire, est-ce faire des demandes à Dieu ? N’est-ce pas lassant ? Elle fut surprise que je lui parle d’être amoureuse. Elle avait un peu raison, mais pourtant c’est avec le même cœur qu’on aime Dieu et les hommes. Alors, comment aimer Dieu ?

Aimer Dieu c’est le prendre au sérieux, considérer sa grandeur, sa générosité aussi. Prendre au sérieux ce qu’il nous demande dans ses commandements. Prendre au sérieux son amour, considérer son regard tourné vers nous.

Aimer Dieu c’est oser dépendre de lui pour notre bonheur. Faire quelque chose non parce que c’est notre intérêt, mais parce qu’il nous l’a demandé.

Aimer Dieu c’est lui faire de la place dans le flot de nos occupations. S’arrêter pour lui, passer du temps à le chercher dans la prière, à lui dire notre amour. Parfois, une prière tout en vaquant, par de petites exclamations d’amour ; parfois une prière où on s’arrête vraiment un moment.

Aimer Dieu c’est le louer, lui dire notre reconnaissance et notre émerveillement. Non seulement quand tout va bien, mais aussi dans les heures sombres, de même qu’au-dessus d’épais nuages demeure le soleil qui continue de briller et d’apporter la vie.

Aimer Dieu c’est s’attacher à lui, laisser un lien vivant s’établir entre lui et nous. Considérer que c’est par ce lien que nous vivons.

Aimer Dieu c’est accepter des inconvénients ou des difficultés à cause de lui, parce que nous voulons lui être fidèle même quand ses commandements ne sont pas à la mode ou sont rejetés par un grand nombre.

Aimer Dieu c’est renoncer à ce qui nous éloigne de lui, ce qui nous accapare trop, ce qui nous enlève la paix, ce qui nous rend superficiels.

Aimer Dieu c’est être prêts à être moqués, rejetés, si c’est pour lui, si c’est vivre la même chose que le Christ.

Aimer Dieu c’est penser à lui avec tendresse, et considérer son regard d’amour sur nous. Son regard d’amour, d’admiration et d’encouragement.

Aimer Dieu c’est l’aimer pour lui-même, et pas pour ce que je pourrais en retirer. C’est ainsi aussi qu’un mari doit aimer sa femme, une épouse son époux. Aimer Dieu, aimer l’autre, parce que c’est lui, l’aimer pour l’aimer. Et néanmoins en retirer beaucoup, parce que l’amour honnête comble le cœur.

Vous voyez, aimer Dieu de tout son cœur, de toute son âme, de tout son esprit et de toute sa force, ce n’est pas seulement lui obéir. À l’opposé ce n’est pas seulement éprouver des sentiments pour lui. Mais c’est un constant mélange de tout cela, un va-et-vient entre toutes ces actions intérieures. Celui qui pratique cela découvre qu’une nouvelle vie se développe en lui, la vie spirituelle. Il faut s’y engager pour la comprendre. Même les enfants sont capables de faire ce chemin. Ils y ont même une aptitude spéciale quand nous ne les épuisons pas avec nos vanités d’adultes. Cf. l’adoration des tout-petits, le groupe « Fais-moi tout petit » le 1er vendredi du mois à la chapelle Notre-Dame de Lourdes d’Aulnois. Un jour saint Augustin se demandait :

« Je ne doute pas, Seigneur que je T’aime. Mais qu’est-ce que j’aime quand je T’aime ? Ce n’est pas la beauté d’un corps ni le vertige d’un moment ni l’éclat de la lumière - cette lumière si chère à mes yeux – ni la douceur des cantilènes, avec leurs variations, ni la senteur des fleurs, des parfums et des arômes, ni la manne ni le miel, ni les membres qui s’enlacent dans les étreintes de la chair ; non ! Ce n’est pas ce que j’aime quand j’aime mon Dieu. Et pourtant, il est une lumière, une voix, un parfum, une nourriture, une étreinte de l’homme intérieur qui est en moi, où brille pour mon âme une lumière que le temps n’emporte pas, où s’exhale un parfum que le vent ne dissipe pas, où se savoure une nourriture que la voracité ne réduit pas, où se nouent les enlacements qu’aucune satiété ne désenlace, voilà ce que j’aime quand j’aime mon Dieu. »1

Bonne découverte de cet amour, en vous y consacrant ! Cet amour qui touche tout l’être faisait dire au saint curé d’Ars : « Ah, mon Dieu ! Faites-moi la grâce de souffrir en Vous aimant, de Vous aimer en souffrant et d’expirer un jour en Vous aimant et en sentant que je Vous aime. »

1Saint Augustin, Confessions, 10, 6-8